« Le colza est la seule culture piège à nitrates rémunérée. »
Itinéraires agroécologiques en colza : concilier rentabilité et respect des ressources
Le maintien du colza est essentiel au sein des territoires de grandes cultures. Rémunérateur, excellente tête de rotation et ressource alimentaire pour les abeilles, cet oléagineux peut toutefois rencontrer des difficultés à l’implantation. Les conditions sèches observées en fin d’été ces dernières années ont particulièrement pénalisé les emblavements. Dans le cadre des itinéraires agroécologiques, nous avons identifié des leviers innovants pour rendre le colza plus robuste en début de cycle, moins sensible aux attaques de grosses altises et plus respectueux de la qualité de l’eau dans les zones de captage de l’eau potable.
Le colza issu d’itinéraires agroécologiques capte de la valeur pour les agriculteurs
La culture du colza est prometteuse. Son maintien au sein des zones de grandes cultures apporte de nombreux bénéfices agronomiques et environnementaux. Considéré comme l’un des éléments de réponse à l’autonomie en protéines végétales, le colza bénéficie d’une recherche variétale soutenue afin d’améliorer la qualité des graines.
Le colza conduit dans le cadre d’itinéraires agroécologiques et bas carbone alimente notamment les filières de production de biodiesel à très faibles émissions de GES et celles destinées à la fabrication de tourteaux. La demande est forte. En plus des cours haussiers, des rémunérations sont obtenues pour les productions tracées et contractualisées.
Les bénéfices agronomiques et environnementaux des itinéraires agroécologiques en colza
Excellente tête de rotation, culture clé pour l’alimentation des abeilles domestiques, le colza a vu ses surfaces totales grimper jusqu’en 2017 à hauteur de 1,6 million d’hectares. Depuis, une baisse continue est enregistrée. Cette culture concerne environ 1 million d’hectares. Le repli des surfaces est particulièrement observé dans l’Est de la France, dans le Berry, le Poitou. En cause, les sécheresses à l’implantation, les attaques de grosses altises sur des colzas peu développés.
Néanmoins, le colza se déploie dans d’autres bassins de production, en Beauce, en Normandie et en Bretagne notamment. Il est considéré comme une culture de diversification et est apprécié pour ses atouts agronomiques. Inséré dans une rotation blé-maïs, le colza permet de gérer les infestations de graminées en diversifiant les familles chimiques utilisées dans la rotation. Enfin, il participe au maintien des populations d’insectes pollinisateurs, dont les abeilles domestiques, en offrant du pollen et du nectar au début du printemps.
« Le colza est une culture au service de l’agroécologie, souligne Sylvain Coudreuse, ingénieur Conseil et Environnement. Faire un colza avant un blé, c’est l’assurance que la céréale livre un meilleur rendement. Toutefois, le colza est une culture avec cycle long qui nécessite beaucoup de surveillance. »
Dans le cadre de notre stratégie agroécologique pour réduire le recours aux intrants, nous préconisons de rendre les colzas plus robustes au démarrage en favorisant une bonne implantation.
Cette implantation repose sur plusieurs leviers tels que la préparation du sol, une date de semis plus précoce, le choix d’une variété vigoureuse au départ, une fertilisation au semis et lorsque les conditions le permettent, d’associer le colza avec des plantes compagnes principalement des légumineuses.
Pourquoi l’intégration de couverts végétaux s’avère gagnante pour le colza ?
Pour améliorer la fertilisation des sols
Les couverts composés de légumineuses améliorent la fertilité du sol en fixant de l’azote, en structurant le sol avec leurs racines. La restitution d’azote au printemps bénéficiera au colza qui de son côté aura piégé les nitrates du sol à l’automne, participant à l’amélioration de la qualité des eaux souterraines.
Pour réduire les attaques des grosses altises
À l’automne, les plantes compagnes jouent un rôle de leurre vis-à-vis des grosses altises. En créant une confusion, cette association diminue la pression sur des colzas à un stade où ils sont particulièrement sensibles
Sylvain Coudreuse
Les colzas associés avec des légumineuses représentent 17% des surfaces en France
(source : données panel 2021)
Comment réussir l’implantation du colza et réduire le recours aux intrants ?
Un colza bien implanté, c’est un colza plus robuste en début de cycle, moins sensible aux aléas climatiques. Plus résilientes, les jeunes pousses subiront moins les dégâts des altises. La réussite de cette implantation implique de réaliser un semis précoce associant des couverts de légumineuses et de recourir au biocontrôle.
Le semis précoce et d’opportunité
En se tenant prêt à semer tôt, dès début août pour profiter des premières pluies, on maxime les chances d’avoir une bonne levée avec des colzas qui seront suffisamment développés lorsque les altises attaqueront.
Le traitement de semence biocontrôle Integral® Pro
Une baisse de 30 % des dommages causés par les grosses altises est observée dans des conditions d’attaques faibles à modérées de ces insectes sur des parcelles dont les semences de colza ont été traitées avec la solution de biocontrôle Integral® Pro.
Les semis de couverts végétaux associés au colza
Les plantes compagnes comme la féverole, le fenugrec, la vesce, les lentilles jouent un rôle clé pour renforcer la vigueur du colza. Cette technique restructure le sol en accroissant sa porosité. Les colzas sont fortifiés grâce à une amélioration de la nutrition azotée due aux légumineuses associées. La bonne couverture du sol, notamment pour les lentilles aide à limiter le développement des adventices. « En cas de parcelle moyennement infestée, le recours à un herbicide qui respecte les légumineuses est recommandé après le semis ou du stade cotylédon à une ou deux feuilles, complète Sylvain Coudreuse. La dose sera modulable. Ainsi dans les itinéraires agroécologiques colza mis en place en 2020 dans la Vienne, la dose d’herbicide classiquement utilisée est réduite de 25 à 50%. Au niveau national, on observe une baisse de l’IFT d’environ 22%. »
Le couvert de légumineuses doit lui aussi être semé tôt, en simultané avec le colza. L’objectif est d’obtenir au moins 200 grammes de couverts par mètre carré. En deça de ce seuil, les bénéfices attendus sont faibles. Un semis précoce permet aussi d’atteindre un stade assez développé à l’entrée de l’hiver et de favoriser la sensibilité du couvert au gel. Autre atout, les espèces associées qui possèdent une croissance rapide jouent un rôle de leurre vis-à-vis des grosses altises. Elles agissent par confusion olfactive ou visuelle. Une expérimentation grandeur nature, réalisée en 2019 dans la Vienne avec le GIEE du Gué de Sciaux, intégre un tel itinéraire agroécologique avec association de couverts végétaux. Les comptages montrent 2,5 fois moins de larves de grosses altises par plante en moyenne en sortie d’hiver par rapport aux bandes témoins. Soit une baisse de la pression insecte de 90 %.
Pour aller plus loin avec le semis de couverts : le colza en agriculture de conservation
En agriculture de conservation le colza peut être semé avec du trèfle blanc nain qui ne sera pas détruit. Celui-ci se développe lentement et ne concurrence par le colza. Il reprend sa croissance fin mars, lorsque le colza assure sa montaison. Le blé pourra être semé directement dans ce trèfle en octobre. Cette technique est un excellent moyen d’accroitre la fertilité des sols. « Le vrai intérêt est de ramener de la matière organique et de la fertilité dans le sol tout en couvrant le sol tout au long de l’année », indique Sylvain Coudreuse. La pratique peut être valorisée dans le cadre du Label Bas Carbone et des itinéraires nets stockeurs de carbone.
Favoriser l’installation des insectes auxiliaires du colza
Le développement des insectes parasitoïdes des larves de grosses altises comme les Tersilochus est un axe à explorer dans les itinéraires agroécologiques colza. L’objectif est de diminuer la pression à l’intérieur de la parcelle en installant par exemple des bandes fleuries non productives qui nourrissent et abritent ces insectes auxiliaires à la culture. Ces espaces hébergent également les insectes pollinisateurs.